Bilan interdisciplinaire du Festival des Sciences et des Arts
Si le Festival des Sciences et des Arts (Jeu de l’Oie) s’est positionné comme un festival de rentrée depuis deux ans, ouvert à toutes et à tous, il est aussi intrinsèquement un festival interdisciplinaire. En effet, intégré parmi les actions portées par la Mission Interdisciplinarité(s) depuis 2021, le festival, créé en 2019 comme festival de sciences sociales et arts, a évolué pour impliquer désormais toutes les sciences, et se présente comme un rendez-vous de l’interdisciplinarité et une démonstration de ses possibles. De plus, par son ouverture qui s’accroît chaque année, il allie l’interdisciplinarité, c’est-à-dire une capacité de rencontre fertile et de co-production entre disciplines scientifiques, à la transdisciplinarité, qui formule cette rencontre avec des acteurs extra-académiques, issus du monde artistique, économique et socio-culturel.
Alors que la programmation et les ambitions du festival ont pu être détaillées dans un précédent billet de ce carnet de recherche, il est tout de même nécessaire de revenir sur la thématique et les enjeux spécifiques de programmation. En effet, le premier intérêt de l’interdisciplinarité et de la transdisciplinarité est sa capacité à appréhender des sujets complexes qu’une seule discipline ne saurait traiter dans son ensemble. Après les questions liées au jeu, au Covid, aux maritimités ou à l’alimentation méditerranéenne, il est apparu que la question du corps, au carrefour des sciences de la vie et des sciences humaines, était un sujet de société en plein mouvement. L’intrication de ses enjeux, tout comme le renouvellement des termes du débat autour du corps, ont appelé à la mobilisation de nombreuses entrées favorisant des rencontres inattendues et des déplacements. Parmi les angles prégnants et visibles dans la programmation, une place importante a été donnée à l’idée de relation, à l’expérimentation de soi, au soin ou encore à la création artistique par le corps, des thèmes qui impliquent par leur nature une connexion entre différents champs. Autant de thèmes qui s’inscrivent autant dans une perspective historique que dans une actualité foisonnante.
L’interdisciplinarité du festival peut se lire à travers plusieurs données. D’abord en mettant en avant les chiffres : ainsi lors de l’évènement, qui s’est déroulé pendant 4 jours sur 3 villes (Aix-en-Provence, Marseille, Aubagne), ce sont près de 68 personnes qui sont intervenues provenant de 14 disciplines différentes (Anthropologie, Art plastique, Création littéraire, Ethique et santé, Ethnologie, Etudes théâtrales, Etudes cinéma, Histoire, Neurosciences, Pharmacognosie, Philosophie, Psychologie du développement, Sciences et technologies, Sociologie). A cet égard, il faut également souligner que 9 composantes sur les 17 d’amU étaient représentées à savoir ALLSH, MMSH, FDSP, IMPGT, EJCAM, SMPM, FS, FSS et l’Inspé, les 5 secteurs d’amU étant impliqués (Santé, Sciences et technologies, Economie et gestion, Droit et Sciences politiques, Arts, Lettres Langues et Sciences Humaines). Cependant, l’interdisciplinarité d’un projet ne saurait se résumer à une lecture purement quantitative, et d’autres caractéristiques viennent soutenir et illustrer la plus-value interdisciplinaire du festival.
Cela est souvent répété, le Festival des Sciences et des Arts (Jeu de l’Oie) est un lieu d’expérimentation. En ce sens, il cherche à mettre en scène un des enjeux de fond et une des compétences supports de l’interdisciplinarité qu’est la créativité. En plus de donner une place fondamentale aux arts présents dès son intitulé, la créativité au sein du festival a également été mise en œuvre dans les formats proposés, grâce à l’opportunité que le thème « corps-à-corps » impliquait dans son potentiel de programmation artistique. En effet, le festival s’est organisé autour de 49 propositions dans 14 formats différents parmi lesquels les projections-débats, projections d’un objet filmique suivies d’une discussion collective avec le public ; les visites, déambulations commentées ou non dans des expositions d’arts visuels ; les pique-niques, repas partagé mêlant participants et intervenants ; les performances, démonstrations artistiques ou propositions scientifiques scénographiées ; les lectures performées, lectures de textes par des comédiens suivies d’une conférence de l’auteur ; les table rondes, débats avec plateau constitué de plusieurs invités et d’une personne à la modération ; les masterclasses, carte blanche à un participant du festival pour un format libre ; les spectacles d’art en espace public, représentations artistiques en extérieur interactives ; les stands, présentations d’associations, de structures ; les concerts ; les ateliers, moments dédiés par petits groupes pour expérimenter des pratiques ; les mini-conférences, conférences de courte durée basées sur l’interactivité et la présentation d’un sujet précis ; du live journalisme, mise en scène d’une conférence de rédaction et de la construction d’un journal en direct et en public et du live radio, enregistrement d’une émission en public et en direct. Grâce à la multiplication de ces formats, des plus classiques aux plus innovants, le festival a proposé au public une expérience complète de participation et de médiation, croisant différentes possibilités d’écoute et d’interaction, et de cette manière d’accès aux savoirs, à la connaissance ou à la culture.
Comme énoncé plus haut, l’enjeu du festival est également de permettre d’allier l’interdisciplinarité à la transdisciplinarité, et de faire dialoguer l’université avec la cité. Ce positionnement à l’interface entre sciences et société suppose une programmation réfléchie avec des acteurs locaux et nationaux y compris hors du champ académique. Cette année, alors que le festival a grandi par son offre et vécu ce qu’il est possible de nommer une « montée en puissance » de par son ambition et ses résultats, le nombre et la variété de ses partenaires témoigne de cette évolution : le Mucem, La Criée, l’APHM, le CNRS, l’IRD, le Théâtre Antoine Vitez, le 3 bis f centre d’arts contemporains, la Ville d’Aix-en-Provence et sa Biennale, la Ville de Marseille, le Département des Bouches-du-Rhône, l’Espace Éthique Paca Corse et l’Espace Éthique IDF, le Frac Sud – Cité de l’art contemporain, ARTE Campus, The Conversation, le 1Hebdo, France Bleu Provence. Que ce soit dans la consolidation de relations de confiance avec deux institutions comme le Mucem ou le Théâtre de La Criée, ou la création de nouveaux partenariats, comme avec la Biennale d’Aix ou l’Espace Ethique Paca Corse et l’Espace Ethique IDF, cette coopération démontre la capacité de l’université à rassembler autour d’elle des acteurs de tous horizons pour proposer des formats de rencontres et de manifestations nouvelles. Ceci a permis de totaliser le nombre de partenaires à 26 dont 11 nouveaux, que ce soit dans le champ artistique et culturel ou médiatique.
Ces données ne sauraient être complètes sans un regard porté sur les publics. Cette année, plus de 6 000 personnes ont assisté au Festival, soit une participation qui a presque doublé depuis l’année dernière. Alors que la participation étudiante a dépassé le tiers du nombre total de participants, avec plus de 2500 étudiants, il est à constater également qu’une programmation inter- et transdisciplinaire facilite la mixité des publics, et ce notamment d’un point de vue générationnel. Cet axe interdisciplinaire semble être une ressource importante dans la recherche de publics intéressés par des manifestations autant scientifiques que culturelles, et ouvre la voie vers un type d’évènement hybride capable de rassembler des publics parfois épars. Que ce soit au niveau des intervenants ou des participants au festival, l’idée de rencontre portée par l’interdisciplinarité et la transdisciplinarité se manifeste donc à diverses échelles, constat encourageant au regard de l’ambition de la Mission Interdisciplinarité(s) de faciliter la création de ponts et de temps d’échange entre l’université et la Cité.
Avec ce festival, l’interdisciplinarité agit à la fois comme espace scientifique où la créativité relie, mais aussi comme un agent social qui a la capacité de rassembler des personnes ou institutions de disciplines ou mondes professionnels divers. Les chiffres ci-dessus montrent qu’en plus d’une véritable rencontre entre les « sciences » (dans leur pluralité) et les « arts » (dans leur diversité), le festival parvient à engager d’autres acteurs institutionnels, des services publics, de l’innovation ou des médias, et donne vie ce faisant au slogan d’amU : « explorer pour faire société ». La Mission Interdisciplinarité(s) d’amU souhaite ainsi continuer, avec ce festival et en synergie avec ses autres actions, à participer à la diffusion d’une culture inter et transdisciplinaire pour favoriser la rencontre d’acteurs divers et initier des collaborations nouvelles et fructueuses.
Crédits photographiques de l’image “à la une” : Jaune Sardine. Droits réservés.
OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Mission interdisciplinarité(s) (20 janvier 2025). Bilan interdisciplinaire du Festival des Sciences et des Arts. Crossdisciplines. Consulté le 18 avril 2025 à l’adresse https://crossdisciplines.hypotheses.org/1595